Charles Jacque


M. Henri Fouquier a avoué ces curieux détails sur le peintre Charles Jacque.

Fort âgé, le peintre Charles Jacque vient de mourir, en son joli hôtel du boulevard de Clichy, encombré de bibelots et de meubles rares. Il avait plus de quatre-vingts ans et travaillait encore. La fortune ne lui était venue que tard, à cinquante ans passés. Jusque-là il avait connu une vie pleine de traverses, il est vrai que cette fortune, au lieu de l’attendre dans son atelier, où elle se fût présentée sûrement plutôt il lui couvrait après par tous les chemins. D’abord graveur industriel, faisant des planches de géographie et de science, ce qui, d’ailleurs, ne nuisit pas à la connaissance technique de son métier, il s’était engagé dans l’armée, par un coup de tête, et y devint sergent.

Au retour de cette belle équipée, il se maria avec une femme dont il eut trois fils, deux qui sont artistes, un qui fût fusillé sous la Commune et une fille, mariée à un peintre. Charles Jacque s’était installé dans le village de Barbizon, à côté du Bas-Bréau, touchant à la plus belle partie de la forêt de Fontainebleau, encore quasiment vierge.

Il avait, très intelligemment, flairé le développement que devait prendre Barbizon, devenu aujourd’hui station estivale. Il rêva d’y trouver la Fortune et se lança dans une foule d’entreprises, pas une ne réussit. Il n’avait pas d’esprit de suite, trop de fantaisie d’artiste. Les paysans roulèrent le Parisien de toutes les façons. Jacque commença par bâtir des maisons. Mais la bâtisse ne ne lui réussit pas. Il se fit ensuite agriculteur. Il planta des asperges dans les terrains sablonneux de Barbizon, très propices à cette culture. Mais il les vendait trois francs la botte et elles lui en coûtaient cinq. Il en alla de même de ses essais d’éleveur de poules superbes qui le ruinèrent. Mais au moins ces coqs de Houdan et ses cochinchinoises lui servirent de modèles et le peintre rattrapa ce que perdit l’éleveur. Un peu dégouté, Jacque quitta Barbizon pour venir à Paris. Et Ià il fit son métier de peintre, où il réussit admirablement, un commerce de meubles et d’étoffes qu’il n’avait pas complétement abandonné, à ces détails, il convient d’ajouter que Jacque était un artiste de grande valeur. Passionné de la nature, il s’attacha à la reproduire sous toutes ses formes. Mais il montra toujours une prédilection particulière pour les scènes agrestes et familières, qu’il excella à rendre avec le burin ou le pinceau.

Nul mieux que lui ne sut présenter les intérieurs des basses-cours, les parcs de mouton, les animaux domestiques. On lui doit dans ce genre plusieurs tableaux célèbres et un très grand nombre d’eaux fortes qui se distinguent par la vigueur du dessin et la bonne distribution de la lumière. Charles Jacque avait obtenu différentes médailles au Salon et avait été nommé chevalier de la Légion d’honneur en 1867.

Almanach Mercredi 27 Février.


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